Soudan : l’ONU alarmée par les attaques délibérées et les violences sexuelles contre les civils
Alors que cela fera bientôt deux mois que durent les affrontements armés opposant les paramilitaires du général Mohamed Hamdane Daglo à l’armée régulière du général Abdel Fattah al-Burhane, le Bureau des droits de l’homme de l’ONU s’est dit préoccupé, vendredi, par l’impact dévastateur que les combats au Soudan continuent d’avoir sur les civils.
Rien que cette semaine, une attaque contre un marché aux bestiaux très fréquenté de la capitale Khartoum a fait au moins huit morts parmi les civils, dont au moins trois membres d’une même famille. Selon le Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme ( HCDH ), la frappe aérienne sur le marché d’Al-Muwaliyyah, le 7 juin, aurait été menée par les forces armées soudanaises.
Lors d’un autre incident survenu le 7 juin, un enfant aurait été tué après qu’un obus ait touché la maison de sa famille dans le district d’Al-Shajraa, dans le sud de Khartoum.
« Nous avons reçu des informations faisant état de l’assassinat de quatre autres civils à Khartoum le 5 juin, et le 4 juin, au moins trois civils, tous membres d’une même famille, dont une femme enceinte, auraient été tués », a déclaré lors d’un point de presse à Genève, Jeremy Laurence, porte-parole du Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme.
Le même jour, des frappes aériennes près du complexe sportif dans le sud de Khartoum ont touché un centre de réfugiés, tuant au moins 10 réfugiés. Selon l’ONU, pas moins de 71 enfants sont morts dans un orphelinat de Khartoum depuis le début des combats en raison du manque d’aide humanitaire, notamment de fournitures médicales.
Des viols, des disparitions forcées et des détentions arbitraires
Les services du Haut-Commissaire Volker Türk se sont également inquiétés par les informations faisant état de violences sexuelles liées au conflit.
« Depuis le début des combats, notre Bureau a reçu des rapports crédibles faisant état de 12 incidents de violence sexuelle liés au conflit, à l’encontre d’au moins 37 femmes - bien que le nombre puisse être plus élevé », a ajouté M. Laurence.
Dans au moins trois incidents, les victimes étaient des jeunes filles. Dans un cas, 18 à 20 femmes auraient été violées, a précisé le Haut-Commissariat.
Par ailleurs, des informations « de plus en plus nombreuses » faisant état de disparitions forcées et de détentions arbitraires sont une autre source d’inquiétude pour le H CDH . Les journalistes sont également exposés à des risques accrus en raison de l’augmentation des discours de haine et de désinformation en ligne.
« Notre Bureau a eu connaissance d’une liste circulant sur les médias sociaux et accusant certains journalistes d’être des partisans du RSF », a fait valoir le porte-parole, relevant avoir observé « des commentaires sur Facebook appelant au meurtre des journalistes figurant sur la liste ».
Face à ces abus, le HCDH réitère son appel aux deux parties aux combats pour qu’elles assurent la protection des civils et le respect du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme. Selon l’ONU, les belligérants doivent également veiller à ce que toutes les violations fassent l’objet d’une enquête efficace et indépendante et à ce que les responsables soient tenus de rendre des comptes.
« Notre priorité du moment est l’accès humanitaire »
« Comme vous le savez, le processus de Jeddah a abouti à un plan de cessation des hostilités de 24 heures à partir de demain [samedi]. Nous espérons que cela fonctionnera et nous donnera l’occasion d’apporter de l’aide », a pour sa part déclaré en fin de journée vendredi le chef des secours de l’ONU lors d’un entretien à ONU Info.
« Khartoum est désespérément dangereuse et a désespérément besoin d’assistance. Nous avons maintenant des contacts approfondis avec les deux armées pour prendre les dispositions nécessaires à la circulation des convois, ce qui est donc la première chose à faire », a précisé Martin Griffiths.
Le chef des secours a expliqué qu’ils s’étaient mis d’accord sur « une opération transfrontalière du Tchad vers le Darfour occidental » afin que d’évaluer l’étendue des violences, de la désolation et de la souffrance, et d’établir une opération humanitaire adaptée pour ces personnes qui n’ont rien depuis 5 ou 6 semaines. « C’est très très important ».
« Ce qui est fondamentalement important, c’est le début d’un processus qui mette fin à cette guerre, qui s’attaque aux raisons qui l’ont déclenchée, qui ramène le pays à un régime civil et qui permette au gouvernement de s’occuper de son peuple », a ajouté M. Griffiths.
« C’est ce que veulent tous les humanitaires : que la résolution du conflit les pousse à cesser leurs activités », a conclu le chef de la Coordination humanitaire de l’ONU.
Vos commentaires